Histoire de la Bastide : Les Boulevards

Le côté sud de l’hexagone, entre les bastions de Montmorency et du Calvaire, centré par la Porte des Jacobins, est sur le tracé de ce qui était,dans la première enceinte, la rue Aluderie, puis le boulevard de la Tour Grosse en 1591. Route Royale de Saint Girons à Carcassonne jusqu’au 19ème siècle, il devient boulevard Saint Michel en 1852 et bientôt, on verra pourquoi, après 1854, boulevard Barbès.
La partie est du boulevard Barbès prend en 1912 le nom du Commandant Christian Roumens ( 1864-1911 ) mort héroïquement au Maroc ; elle est doublée de la promenade des Tilleuls.
A l’emplacement de l’ancienne clinique jouxtant le bastion Montmorency, il y a eu à la fin du 19ème siècle un café-glacier !
Au n°10, la maison des syndicats, qui s’orne de sculptures, a succédé au théâtre de l’Eden ; bnnhla maison du n°12 a été celle de Jean-François Champagne ( 1763-1847 ), architecte de la ville, et de son fils Sargine ( 1795-1874 ), architecte du département ; c’est aussi la maison natale du Commandant Roumens.
Le boulevard Roumens accueille depuis peu le grand marché du samedi naguère tenu place Carnot.
La place du Général de Gaulle, récemment réaménagée d’heureuse manière, fait la jonction avec ce qui est resté le boulevard Barbès. Sa dénomination actuelle rend hommage à un personnage qui n’est pas né à Carcassonne et y a peu vécu, mais a toujours eu des liens étroits avec la région.

Armand Barbès est né en 1809 à Poite-à-Pitre d’un père chirurgien militaire muté en 1801 en Guadeloupe. De retour à Carcassonne avec sa famille, il y reçoit en 1830 le  baptême révolutionnaire » à la tête du bataillon local de la Garde Nationale. A partir de 1832 il fait à Paris des études de droit mais n’exercera aucune fonction, la mort prématurée de ses parents lui laissant un confortable héritage. Il peut ainsi se livrer à sa seule passion : conspirer contre la monarchie de juillet en collaborant bientôt avec Auguste Blanqui, en créant diverses sociétés secrètes, ce qui lui vaut une première incarcération en 1834. En 1839 c’est une véritable tentative de coup d’état : tandis que Blanqui s’échappe, il est arrêté et de nouveau emprisonné. Libéré en 1848, il devient colonel de la Garde Nationale et est envoyé contre une manifestation de Louis Blanc et Blanqui, pour lequel il éprouve bientôt une véritable détestation

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Elu de Carcassonne à l’Assemblée Constituante, il n’y fait qu’un bref passage, prenant la tête d’une nouvelle insurrection ; il est condamné à mort mais grâcié sur intervention de Victor Hugo. Sa détention perpétuelle est levée en 1854 par Napoléon III. C’est à ce moment que son nom est donné au boulevard. Il s’exile alors aux Pays-Bas où il meurt à La Haye en 1870 juste avant la guerre et la naissance de la 3ème République.
Mais il est inhumé dans le domaine de Fourtou à Villalier. Sa statue par Falguière ( de 1886 ) trône sur son boulevard. Celui-ci, bordé de quelque maisons
ornées de balcons à ferronneries, surplombe comme on l’a vu le parvis de la cathédrale Saint Michel. Il est le lieu de toutes les manifestations et d’un marché
haut en couleurs le samedi.


C’est un homme qui fut parfois son compère qui a donné son nom au boulevard du côté sud-ouest, du Bastion du Calvaire à la porte de Toulouse :
Théophile Marcou, républicain convaincu comme lui et quelque peu anticlérical, bien qu’ayant un prénom qui signifie « aimant Dieu » et fils d’un prêtre constitutionnel !
Ce boulevard s’était appelé boulevard de la Tour Grosse, puis en 1852 du Calvaire et en 1883 du Lycée, avant de prendre en 1898 le nom de celui qui était devenu un important personnage politique carcassonnais : né en 1813, proche des révolutionnaires de 1848, condamné en 1851 pour incitation à la révolte, un temps exilé en Espagne, mais devenu maire de Carcassonne de 1870 à 1879, un temps auto-proclamé préfet mais démis par Gambetta, député en 1873 puis Président du Conseil Général et sénateur en 1886, mort en 1893.
On sait que les plaques des noms de rues sont trop souvent manquantes à Carcassonne comme dans beaucoup de villes ; le Boulevard Marcou bât un record : sur toute sa longueur, deux plaques seulement indiquent son nom.
Les maisons qui le bordent, surtout à l’ouest, sont souvent élégantes, avec des ferronneries et parfois des têtes sculptées aux fenêtres. 

Jusqu’en 1939, on pratiquait la boule lyonnaise aux abords de la place Davilla. Davilla, dont la place, qui était le rond-point de la porte de Toulouse depuis 1809, avec l’octroi, a pris le nom en 1899, est un personnage énigmatique : « lo consol da Villa », défenseur de la bastide lors de l’attaque du Prince Noir en 1355 ( ? ), mais Davilla est-il son nom propre ou signifie-t-il seulement : de la ville ?
On avait érigé en 1858 sur cette place, après une épidémie de choléra, remplaçant une croix de mission de 1815, une croix en fer forgé, avec un piédestal sculpté par Jean-Isidore Nelli, qui a été transférée en 1881 au chevet de la cathédrale Saint Michel. En 1902 est édifiée en son centre une halle aux grains aux murs de brique à parements de céramique et charpente de fer, qui va être démolie en 1939-1940.

A l’angle de l’allée d’Iéna, côté nord, la façade d’une maison s’orne d’un cartouche figurant la croix de la Légion d’Honneur.

 La maison qui fait l’angle du Boulevard de Varsovie, du début du 20ème siècle, a belle allure avec sa tour d’angle.
Terminant ce tour des boulevards, celui de Varsovie, du côté nord-ouest, entre la place Davilla et le bastion Saint Martial, s’ouvre autour du monumental
monument aux Morts daté de 1914.
Il s’est appelé précédemment Boulevard Saint Martial depuis 1590, puis boulevard de l’Ouest aux 18ème et 19ème siècles. Il est rejoint et longé par le Canal du Midi venu de l’ouest, bordé en rive droite par la rue Pierre Charles Lespinasse, en rive gauche par la rue Pierre Sémard, portion de la promenade du canal, jusqu’au pont de la Paix ( de 1802 avec l’Angleterre, bien provisoire ! ).

Au nord de cette arrivée du canal, il n’est donc bordé de maisons que d’un côté.
Le bâtiment le plus important est le collège de Varsovie ; il occupe le carron où s’élevait au 14èmesiècle le couvent de la Merci, de l’Ordre de Saint Antoine, le nom de la Merci venant de la vocation de ces moines de racheter les chrétiens prisonniers des musulmans ; à ce couvent avaient succédé de1780 à 1792 le séminaire diocésain, de 1821 à 1857 le couvent des Frères de la doctrine chrétienne, puis l’école de jeunes filles de la congrégation de Notre-Dame, dissoute en 1904, la pension Jeanne d’Arc jusqu’en 1913, et un collège de jeunes filles à partir de 1916 ; le bâtiment, dans lequel ne subsistent que quelques vestiges du
17ème siècle, a été totalement rénové à partir de 1928 pour recevoir un  lycée de jeunes filles puis l’actuel collège.

Le style de ce bâtiment est tout à fait comparable à celui de l’école du bastion, qui a amputé de moitié ce bastion, à l’angle du boulevard Omer Sarraut, en 1879, et qui, lui, est l’oeuvre de Paul Emile Enderlin, surtout célèbre par l’école Jean Jaurès.

De l’autre côté du canal, une très belle maison attire l’oeil, spécimen de l’ « Art Nouveau » ; c’est la maison Lamourelle, construite par Alphonse Lamourelle ( 1856-1926 ), héritier en 1880 de l’usine de tri de chiffons fondée par son oncle Raymond Sarraute ( 1830-1890 ) venu du
Comminges.
Elle vient d’être restaurée excellemment .